Gerhardt Attard (1) a réalisé avec son équipe une étude de phase IV randomisée, en double aveugle, avec contrôle contre placebo, afin d’examiner la pertinence du maintien d’ENZ après progression du PSA chez les hommes atteints d’un mCRPC et n’ayant encore jamais suivi de chimiothérapie.
L’approche standard dans ce cas consiste à administrer de l’ENZ suivi d’ABI. Attard est parti de l’hypothèse que la résistance à l’ENZ résulte d’une augmentation des androgènes et qu’elle peut être évitée en combinant le traitement avec de l’ABI, un inhibiteur de la synthèse des androgènes. Ces deux molécules ont en effet un mécanisme d’action différent. En cas d’augmentation des androgènes sous ENZ, l’inhibition de leur synthèse sous l’antagonisme persistant du RA pourrait réinduire la sensibilité à l’ENZ.
Mise sur pied par Attard, l’étude PLATO a examiné si les hommes présentant une progression sous ENZ obtiendraient de meilleurs résultats en le poursuivant en association avec de l’ABI/P, plutôt que sous ABI/P uniquement. Dans une 1ère phase, des hommes atteints d’un mCRPC et n’ayant encore jamais reçu de chimiothérapie ont été placés sous ENZ (160mg). Les hommes chez qui le PSA n’avait pas augmenté depuis le début jusqu’à la semaine 13 et la semaine 21 ont poursuivi le traitement jusqu’à la progression du PSA. Ils ont ensuite été randomisés dans une 2e phase (1:1) entre ENZ + ABI/P (1.000mg/10mg) ou placebo + ABI/P. Le critère d’évaluation principal était la PFS (progression au niveau clinique ou radiographique ou décès pendant l’étude) au cours de la 2e phase. Les critères d’évaluation secondaires étaient le TTPP et une réponse du PSA ≥ 50% lors de la 2e phase.
Pour la 1ère phase de l’étude, Attard et son équipe ont inclus 509 hommes. Au final, 251 sont entrés en ligne de compte pour la randomisation dans la 2e phase (ENZ + ABI/P, n = 126; placebo + ABI/P, n = 125). La durée médiane de traitement au cours de la 2e phase était de 5,6 mois pour les 2 bras. La PFS s’élevait respectivement pour la progression radiographique, clinique ou le décès, à 38,1%, 25,4% et 2,4% pour le bras ENZ + ABI/P, et 55,2%, 18,6% et 1,8% pour le bras placebo + ABI/P. La PFS médiane était de 5,7 mois pour le bras ENZ + ABI/P et 5,6 mois pour le bras placebo + ABI/P (p = 0,22). Le TTPP médian s’élevait à 2,8 mois dans les 2 bras (p = 0,45). Les effets secondaires les plus fréquents sous ENZ + ABI/P par rapport au bras placebo + ABI/P étaient des dorsalgies (21% contre 23%), de l’hypertension (20% contre 7%), des nausées (17% contre 9%) et de la fatigue (14% contre 15%).
Attard a conclu que le maintien de l’ENZ après ajout d’ABI/P pour cause de progression du PSA n’a pas permis une amélioration statistiquement significative de la PFS et a par ailleurs entraîné davantage d’effets secondaires, dont de l’hypertension. Il a enfin insisté sur l’importance des analyses des biomarqueurs qui se poursuivent dans le cadre de l’étude PLATO, afin d’identifier des sous-groupes qui pourraient retirer des effets favorables de la poursuite de l’ENZ après le début du schéma ABI/P.
Ces résultats corroborent d’ailleurs ceux de l’étude LATITUDE réalisée par Karim Fizazi et al., publiée en ligne dans l’édition du 4 juin du New England Journal of Medicine.